Texture romanesque
et
Analyse structurale
La Modification de Michel Butor
• Résumé en français de la thèse
de doctorat (Roman Kurgusu ve Yapisal Çözümleme: Michel
Butor’un Degisim’i) soutenue le 18 novembre 1977 à la Faculté
des lettres de l’Université d’Istanbul. 1e édition: Éditions
de l’Université d’Istanbul, 1978. 2e édition remaniée:
Éditions Yapi Kredi, 2012
Nous inscrivant
dans la ligne des analyses textuelles et prenant comme objet d’étude
La Modification de Michel Butor, nous nous sommes attaché
à manipuler le parcours séquentiel du texte, et nous avons
tenté par la même action de contribuer à l’organisation
d’un modèle d’analyse formelle, d’une grammaire discursive.
La Modification,
comme objet sémiotique jalonné de multiples séquences,
nous a obligé de transformer les problématiques en concepts
opératoires et de constituer un système de règles
permettant de revivre, entre autres, la structure des transitions. Pour
ce faire, on s’est efforcé, par une démarche reconstructive,
d’opérer sur l’organisation textuelle, de dégager la complexité
de la forme et de démonter le système profond de l’enchaînement
séquentiel.
Ce texte–labyrinthe,
se présentant comme un dispositif spatio–temporel dont les états
finals des segments contigus (séquences) marquent des retours précis
aux états initiaux, forme un «texte abymé» qui
se commente sans cesse dans son intratexte.
Le mot «modification»
indiquant tout d’abord que le sujet ou l’actant principal change de dessein
durant le voyage, la manipulation du texte nous décèle des
modifications, des transformations cycliques dans tous les sens.
Au début
du texte, Léon, décidé à abandonner sa femme
Henriette, quitte Paris pour rejoindre sa maîtresse Cécile,
à Rome. Mais plus il s’approche de Cécile, plus sa passion
pour elle s’affaiblit. Cette première approche même nous signale
la présence d’un cycle créé non seulement dans la
dimension narrative mais surtout dans la typographie ainsi que dans la
segmentation textuelle et dans l’enchaînement des unités discursives.
Le texte,
linguistiquement clôturé par le symbole de la vitesse de lecture
qu’est «Le Blanc», comporte l’organistation sous–jacente suivante
:
OUVERTURE / FERMETURE / OUVERTURE
Ce système
symétrique est déchiffrable au niveau de l’articulation des
trois parties, des neuf chapitres et de multiples séquences.
La Modification
est, avant tout, formé d’unités-satellites dont chacune reflète
le cycle textuel. Et les éléments qui le constituent sont
des unités de transition qui articulent le parcours séquentiel.
Les cinq unités
de transition que l’on a prises en compte nous ont permis de mieux connaître
l’intratextualité de l’oeuvre qui s’inscrit en notre espace comme
un voyage organisé. En effet, c’est par cette démarche de
notre lecture que nous avons pu dégager la typologie des transitions
qui se conforment au même système symétrique que celui
de la signification de l’oeuvre.
La distribution
des unités de transition peut être exprimée par le
tableau suivant :
TABLEAU DES UNITÉS DE TRANSITION
RÈGLE OPERATOIRE
(OUVERTURE / FERMETURE / OUVERTURE)
I. LE BLANC
1. GRAND: 1. Au commencement et à la fin du roman
2. MOYEN: 2. Entre les parties
Entre les chapitres
3. PETIT: Entre les séquences
II. LES SUITES DE SIGNES
1. PASSE LA GARE DE:
Ouvrant et fermant la «séquence au présent»
2. DE L’AUTRE CÔTÉ DU CORRIDOR:
Ouvrant et fermant la «séquence au futur»
3. AU-DELÀ DE LA FENÊTRE:
Ouvrant et fermant la «séquence au passé proche»
4. SUR LE TAPIS DE FER:
Ouvrant et fermant la «séquence au passé avec Cécile»
5. UN HOMME PASSE LA TÊTE:
Ouvrant et fermant la «séquence au passé avec Henriette»
III. LE LIVRE
Ouvrant et fermant les chapitres
IV. LE COMPARTIMENT: ENTRÉE ET SORTIE
Ouvrant et fermant les chapitres
V. LES UNITES MICRO-COSMIQUES et MACRO-COSMIQUES
1. LES UNITÉS MICRO-COSMIQUES: Elles prennent place dans les phrases
précédées de «SUR LE TAPIS DE FER...»
Elles ouvrent et ferment les séquences
2. LES UNITÉS MACRO-COSMIQUES: 1. VÉHICULES: Ouvrant et fermant
les
séquences
2. FAITS: Ouvrant et fermant les
séquences (Elles suivent les suites de signes)
Infini et structuré
à la fois, ce texte de Michel Butor est un «laboratoire du
récit» dans lequel «le travail sur la forme revêt
une importance de premier plan.»
Et notre analyse,
en tant qu’une traversée du discours, nous a donné la possibilité
d’exposer le rythme systémique de la forme de l’oeuvre qui est tendue
vers le lecteur et de revivre l’aventure plurielle de son écriture.