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Table des index
Poésie au jour le jour 31
(enregistré en juillet 2014)
in memoriam Utamaro
1) L’anémone de merA la moindre approche
je me rétracte
en un gros bouton
de cuir luisant
puis je m’épanouis2) Le poulpe
Estomac mobile
avec mes yeux
et mes tentacules
je fais la chasse
aux miettes vivantes3) Le crabe
Marchant de côté
j’ouvre mes pinces
pour saisir mes proies
les étudier
puis les absorber4) L’oursin
Hérisson des mers
jade ou pourpré
perdant mes épines
je deviens balle
du ping-pong des vagues5) L’astérie
Pour me déplacer
j’arque mes bras
sur sable ou rocher
cherchant fortune
de crique en bassin6) L’hippocampe
Cheval de parade
sur l’échiquier
de filets et d’ombres
entre deux eaux
porteur de portées7) La coquille saint-Jacques
Jonchant le chemin
des pèlerins
qui m’ont dégustée
noix et corail
entre deux étapes
avec un salut à Victor Hugo qui le premier a su nous découvrir les vertus esthétiques du chiffre onze cent onze :
“Il y avait un certain temps déjà que neuf heures avaient sonné au vieux clocher roman couvert de lierre qui partage avec l’église de Saint-Brelade de Jersey la bizarrerie d’avoir pour date quatre un : IIII; ce qui signifie onze cent onze.”
Les Travailleurs de la mer, III, I, 1
Quatre bâtons sur une ardoise
avec la craie pour les romains
c’est quatre mais pour les arabes
cela dépasse mille et unUne minute se faufile
parmi les styles et calames
une heure vient la relayer
avec ses cloches et cadrans
Quatre barreaux de fer scellésEn 1111 en France règne Louis le Gros
aux fenêtres de la prison
de l’autre côté de la grille
le temps passé se rit de nousQuatre fissures dans le murUne heure tourne les minutes
dans sa marmite de sorcière
un jour s’applique à les filtrer
pour en extraire les alcools
pour laisser passer les fantômes
des quadrupèdes antérieurs
aux catastrophes planétairesUne journée tresse les heures
avec leurs à-coups et retards
une semaine les tricote
avec leurs oublis et projets
IIII
un petit empire
450 troufions 450 sous-fifres
75 sergents 75 adjoints
25 capitaines 25 directeurs
5 généraux 5 ministres
1
empereur
_________________________
555 +
1 + 555
Quatre tours autour du château
pour engranger les souvenirs
multiplier les araignées
avec leurs pièges à nouvellesQuatre mâts et leurs pavillonsLa semaine compte ses jours
pour en arriver au dimanche
le mois détaille quatre phases
pour programmer fêtes nocturnes
les marins roulent leurs cordages
les poissons pendus par les ouïes
l’odeur de l’iode et du calfatQuatre bouteilles dans la caveLe mois égrène ses semaines
comme un moine son chapelet
la saison passe d’équinoxe
en solstice et vice-versa
pour fêter la fin de la guerre
qu’elles ne vieillissent pas trop
et puis nous les remplaceronsLa saison rumine ses mois
tandis que la végétation
feuillette l’agenda de l’an
pour savoir quand pousser ses cris
1111 = 11 x 101
Quatre doigts devant le visage
pour qu’on devine le sourire
ou quatre mèches sur la tempe
sortant de la mer à midiL’année passe en revue les mois
vérification des couleurs
le siècle trie ses décennies
comptabilisation des chutes
1111 = (10 x 111) +
1
Quatre balafres sur la joue
après une journée de rixes
dans les bas-fonds de Buenos-Aires
quatre cigares dans la pocheLe siècle entasse les années
comme un vieil avare ses sous
le millénaire vient ouvrir
des issues dans l’encombrement
Dans le catalogue de l’Écart
arriverons-nous jusqu’au
cent onze cent onze
11111
?
Quatre griffes en signature
sous les jambages et les chiffres
avec les ombres des feuillages
sur les cahiers des écoliersLe millénaire voit les siècles
s’écrouler les uns sur les autres
les ères passent sur les ruines
attendant leurs archéologues
Courant dans les quadrillages
des prairies cruciverbistes
pour se délivrer du taon
qui l’assaille jour et nuit
Io retrouve la baignoire
qui servait en son palais
à ses toilettes intimesC’est Hermès qui l’encourage
à boire cette eau magique
pour retrouver forme humaine
puis la conduire en Égypte
épouser le pharaon
dans les temples des déesses
qui ont des cornes au front
Missive qui promettait illusoirement monts et merveilles à ses destinataires
- et quelques-uns s’y sont laissés prendre sans doute, poissons d’eau douce -,
missive qui nous parvient rescapée de maints déménagements et décharges,
porteuse de son élégance intacte d’escroc ingénu
C’est la porte du siècle
et l’on ne réussit
pas à l’ouvrir cela
fait déjà des années
que l’on essaie s’acharne
sans aucun résultatOn a bien consulté
toutes sortes d’experts
et cela grince et branle
mais en vain pas moyen
d’ouvrir cette barrière
et traverser le seuilEt certains imaginent
impatients qu’il faudrait
faire sauter tout ça
terreur et destruction
raser les vieilles tours
crever le mur du tempsMais après la secousse
les linteaux et verrous
ont repris leurs factions
insensibles aux voix
qui crient dans l’incendie
la famine ou les coupsOn aperçoit pourtant
à travers les fissures
les voyages promis
depuis des millénaires
et le renversement
des pouvoirs d’aujourd’huiPour ouvrir ce miroir
et nous débarrasser
des ingénieux virus
du siècle précédent
force nous est de fondre
la clef d’incantation
Ouvrir l’oeil la bouche la main les bras
l’objectif la serrure le coffre la vitre
le ban le bal la fête le festival
l’opéra le concours l’exposition le palmarès
la séance les délibérations les hostilités
les négociations les frontières les échanges
le courrier le testament la succession
les perspectives les horizons les conversations
la saison l’époque le siècle le paradis
Les profanateurs n’ont pas hésité à tourner leurs lance-flammes sur Brocéliande. A toutes les questions des journalistes ils répondent qu’ils ne savaient rien, qu’ils ont agi sur ordre, et qu’ils sont désolés. Mais leur visage est devenu vert et ils prennent racine dans les marais d’alentour pour contempler, immobiles durant de longues années, le désastre qu’ils ont provoqué.
Les sabots sur notre plancher
nous regardons filer les trains
qui sont maintenant si rapides
qu’ils sont devenus des fantômesIl est désormais inutile
d’essayer de tourner la tête
pour accompagner leur passage
de nos yeux de goudron tranquilleComme un coup de fouet dans un cirque
sur leurs rails ils se précipitent
vers un destin qu’ils ne connaissent
pas plus que nous qui les aimonsCes gens qui boivent notre lait
se nourrissent de notre viande
font des sacs avec notre cuir
des fêtes avec notre mort
Il suffit que tu me regardes
pour que des insectes grésillent
dans les disques de mon ordinateur
ils vont chercher des informations
dans bibliothèques et jardins
et composent des bouquets de textes
que je n’ai plus qu’à mettre dans tes mains
De l’autre côté du pré
où brillent des fleurs sauvages
graminées de balançant
pissenlits sous la rosée
l’école de mon enfance
lance toujours ses cris verts
pendant les récréationsAu long des quatre saisons
les ombres des arbres tournent
d’abord le dessin des branches
puis l’estompe des bourgeons
les touches de l’éclosion
les parfums et les pétales
les fruits la pourpre et la pluieLes ongles d’un clavecin
se faufilent sur les touffes
y aiguisant leurs ciseaux
leurs épingles leurs aiguilles
pour recoudre les accrocs
dans l’écoulement du temps
et les pliages du soirQuand c’est le temps des oiseaux
l’imagination des merles
cherche les meilleurs endroits
pour disposer ses dialogues
et quand les rayons de Lune
remplacent ceux du Soleil
le rossignol improviseLe parfum du foin coupé
les murmures des lavandes
l’éveil des fleurs d’oranger
les alcools des bigarades
la douceur des abricots
les dents sur la peau des pommes
le jus coulant sur les doigtsUn tas de sable doré
une plage à domicile
avec récipients divers
que l’on rangera demain
des parasols à rayures
et des meubles de métal
qu’il faudra bientôt repeindreLes fenêtres se transforment
en rectangles de lumière
sur le mur de la maison
qui s’assombrit peu à peu
on interrompt sa lecture
et l’on referme le livre
qu’on ne peut plus déchiffrerEt les signes du zodiaque
quand la nuit s’est éclaircie
entre nuages et fumées
accompagnés de planètes
font défiler leurs emblèmes
pour donner inspiration
aux veilles des solitaires
1 (janvier)On l’attendait depuis longtemps
quelques flocons étaient tombés
recouvrant les toits puis fondant
et se transformant en glaçons
le long des troncs et des gouttières
mais maintenant c’est le grand blanc
qui couvre les os de la Terre
de son drap de cérémonie2 (février)
Les roues grincent les amateurs
sortent des wagons suspendus
avec leurs planches sur l’épaule
et leurs bâtons à leurs poignets
puis ils zigzaguent sur les pistes
et les jeunes gens font des sauts
en se retournant sur les bords
du demi-tuyau préparé3 (mars)
Le grand blanc va jusqu’au grand bleu
où les avions laissent leurs traces
la découpure s’agrémente
d’ombres et de rayons changeants
on apprend l’alphabet des cimes
en cherchant le moyen d’aller
de l’autre côté de la barre
découvrir les versants intacts4 (avril)
La couverture s’amincit
des museaux sortent de leurs trous
une marée de langues vertes
monte à l’assaut de la blancheur
qui s’irise sous les éclats
s’insinuant entre les branches
des mélèzes dont les bouquets
s’entrouvrent comme des paupières5 (mai)
Il faut monter beaucoup plus haut
pour trouver les pistes propices
les machines sont arrêtées
des flaques sur tous les rochers
entourées de touffes de fleurs
qu’insectes viennent visiter
poursuivis par jeunes oiseaux
perfectionnant leurs nouveaux cris6 (juin)
Depuis le fond de la vallée
les arbres fruitiers s’échelonnent
leurs floraisons se succédant
couvrant les vergers d’une neige
de pétales que le vent lève
en tourbillons dans le soleil
qui réchauffe les forêts noires
jusqu’aux limites des glaciers7 (juillet)
Les machines étincelantes
déversent maintenant touristes
avec souliers cloutés cordages
suivant les guides vers les cimes
de quelque muraille au-dessus
des prés où tintent les sonnailles
des troupeaux en villégiature
pour se repaître d’horizon8 (août)
Déjà les parois répercutent
premiers roulements de tonnerre
les escaladeurs se dépêchent
avec leurs piolets et pitons
de redescendre avant l’averse
par les corridors incertains
qui leur permettront de rejoindre
sentiers refuges et foyers9 (septembre)
Le paysage se transforme
à chaque minute soudain
tel rideau de pluie se déplace
pour nous découvrir une scène
de délices inattendues
inondée par le projecteur
du Soleil qui presque aussitôt
part illuminer autre chose10 (octobre)
Cailloux bleus devant schistes rouges
avec l’écru de la falaise
les mélèzes deviennent jaunes
et les herbes rousses les arbres
flamboient dans le fond des vallées
où l’on termine les vendanges
dans la station les commerçants
prennent à leur tour leurs vacances11 (novembre)
On a fleuri les cimetières
les mélèzes n’ont plus d’aiguilles
le vent fait grincer leurs branchages
les corbeaux tournoient sur les pentes
quelques promeneurs solitaires
fendent la pluie pour méditer
les gens regardent la télé
quand déjà quelques flocons planent12 (décembre)
Tous les professionnels sont là
pour préparer le démarrage
de la saison skis restaurants
les magasins de vêtements
on visse puis on vérifie
que tout baigne dans l’huile et puis
des sapins à bougies partout
et carillons dans les églises
1Les roseaux sur la surface de l’étang
le fouet enlacé au lasso disperse
les brindilles filant à la dérive
la plume d’un geai tombe sur les bulles
près du train d’antan qui part dans la brume
une vague brusque efface l’image2
le fouet enlacé au lasso escalade
les tuyaux d’orgue pour finir la phrase
barres de mesure à l’assaut des nuages
avec la vibration d’une lame de cuivre
une vague lisse efface l’image
prolonge une fissure dans mes os3
Le point d’orgue pour finir la phrase
parmi les éventails de ressorts et d’aiguilles
avec le trépignement d’adjectifs acides
le point-virgule relance les dés
prolonge une fougère dans mes os
sur le tapis du silence velouté d’ail4
Parmi les éventails de ressorts et balanciers
l’archet s’appuyant sur les doubles voies
les secondes culbutent dans la coupelle transparente
puis rebondissent en gerbes d’algues métalliques
sur le tapis du silence velouté d’ambre
pour nous prendre aux pièges de leurs cadrans5
L’archet s’appuyant sur les doubles cordes
les poings serrés sur les commandes
le chevalet enjambant les tranchées
où les impulsions nerveuses sèment leurs nouvelles
pour nous prendre aux pièges de leurs tremblements
cuisant au soleil de nos industries6
Les poings serrés sur les outils
les roseaux sur la surface de la plaque
le pied sur la pédale du frein
le damier des cultures qui vire avec l’encre
germant au soleil de nos industries
près du train d’antan qui fond dans les eaux
Nous avons arpenté les rues
pendant des siècles de jeunesse
le ciel avait des cheveux blancs
le Soleil est devenu noir
nous avons parcouru la TerreLes poings fermés les dents serrées
nous avons arpenté les rues
les toits devenaient dents de scie
nous cherchions la clef la formule
dans les mâchoires du dragonUne torche dans notre tête
une forge dans notre coeur
nous avons arpenté les rues
interrogeant les inconnus
déchiffrant graffiti et stèlesLa faim tourmentait nos entrailles
grelottant de peur et d’ennui
ruisselant de sueur et d’oubli
nous avons arpenté les rues
perdant nos papiers et nos tracesNous avons fouillé dans le sable
dans les cendres et les gravats
pour retourner les nécropoles
reconstituant des métropoles
nous avons arpenté les ruesAvec nos caméras et brosses
nous avons fouillé dans le sable
pour relever des inscriptions
le Soleil retrouvant son or
le ciel naviguant outre merLes fantômes se rassemblaient
les chacals criaient dans la nuit
nous avons fouillé dans le sable
pour retrouver des ossements
perles ayant perdu leur filCampant sous la tôle ou la toile
serrant cordages ou lacets
en imaginant des royaumes
nous avons fouillé dans le sable
dégageant bijoux et monnaiesNous avons caressé la peau
de momies tombant en poussière
tentant par notre humidité
de raviver couleurs anciennes
nous avons fouillé dans le sableParfois soulevant les cheveux
nous avons caressé la peau
de secrétaires d’infirmières
ou de jeunes archéologues
entre sommeil et réflexionSéduits par regards et sourires
les attendant au crépuscule
nous avons caressé la peau
de leur poitrine et de leur ventre
en essayant de leur parlerDans le silence traversé
par leur respiration rapide
et la furie de notre sang
nous avons caressé la peau
de leur visage et leur voyageNous avons parcouru la Terre
déserts océans toundras villes
et dans toutes nos aventures
incorrigibles solitaires
nous avons caressé la peauDes animaux et des sirènes
nous avons parcouru la Terre
sur l’hippogriffe du pétrole
perdant le Nord et le trouvant
dans la révolution des ombresToutes boussoles affolées
scrutant les signes d’horizons
nous avons parcouru la Terre
forêts marais fleuves montagnes
prenant les empreintes du tempsBranches tordues roseaux saignant
de leur encre sur le papier
nymphes des étangs et faubourgs
nous avons parcouru la Terre
sous le fouet des intempériesNous avons arpenté les rues...
Onze est un mètre rarement employé
par nos poètes dans leurs compositions
hendécasyllabe disent les savants
c’est pourtant le vers utilisé par Dante
pour écrire sa Divine Comédie
mais c’est très difficile dans notre langue
où cela donne l’impression de boiter
ce qui certes convient admirablement
à notre âge à notre temps aux catastrophes
qui nous circonviennent dans cet Enfer
cherchant Purgatoire vers un Paradis
Cet ouvrage réalisé
à Paris et Lucinges
pour le 11 novembre
2003
est enregistré à l’avance
dans le catalogue
de l’Écart
sous le numéro
11 x 11 x 11
à savoir 1331
Le loup ne se consolait pas d’être un loup et d’être traité comme un loup. Admirant les hommes il aurait aimé les servir comme un chien. Il aurait égorgé leurs moutons à leur place et les aurait déposés à leurs pieds. Mais ils ne voulaient rien entendre de ce genre et le visaient avec leurs armes dès qu’il s’approchait de leurs bergeries.Aussi faisait-il de longs détours pour éviter leurs habitations; mais la haine des bergers ne s’en satisfaisait pas pour autant. Dans les endroits les plus sauvages, où l’on s’y serait le moins attendu, ils avaient disposé d’ingénieux pièges à mâchoires métalliques beaucoup plus tranchantes que celles des loups, et un jour, aveuglé par ses propres larmes, il s’y laissa prendre.
Ce n’est pas seulement sa patte qui se mit à le brûler, mais le monde entier. Le Soleil ricanait en émettant des flammes qui calcinaient prés et forêts. Tout était devenu sable et roc avec des lacs de lave. Il ne pouvait que fuir et fuir jusqu’au moment où lui apparut l’oasis.
C’étaient de grands arbres de toutes sortes, palmiers, cèdres, d’autres encore, qui semblaient le reconnaître et l’accueillir. Du plus grand d’entre eux coulait une source miraculeuse qui guérit ses blessures et brûlures, tandis que les feuilles le caressaient. Mais s’il ne souffrait plus de la même manière, chacun de ses pas laissait pourtant des traces de sang, auprès desquelles il en vit bientôt d’autres qui étaient certainement celles d’un oiseau.
Comme il continuait par dunes et pierriers autour desquels des touffes de fleurs éclosaient à son passage, il sentit que chacune de ces autres traces se transformait en plume pour le précéder; et de leur tourbillon naquit un grand oiseau couleur de pivoine et de pourpre.
L’oiseau volant et revolant fit monter le loup jusqu’au sommet d’une colline et lui découvrit un lac silencieux dont les rives bordées de roseaux balancés par le vent dessinaient comme un cygne palpitant qui l’invitait à venir se mirer dans ses eaux.
Mais s’amoncelèrent de terribles nuages qui le menaçaient avec des dents de pièges et des regards d’hommes enragés, double ouragan qui arrachait tout sur son passage tandis que la foudre frappait en tous sens et que le loup perdait sa respiration sous la bourrasque.
Soudain la gueule de l’orage aspira toute l’eau du lac, et les éclairs devinrent des ailes, les nuages des plumes blanches et le tonnerre un chant d’espoir et de mélancolie. A la place du lac disparu se tenait un cygne bleu transparent qui répandait sur la terre dévastée une bénédiction de bulles.
La nuit était venue avec sa fraîcheur. Depuis la poitrine du cygne la Lune éclairait les ailes de nuages qui faisaient danser dans leur brise les arbres retrouvant toute leur verdeur et leur énergie de fructification. Le loup s’efforçait de suivre cette enseigne vive en pleurant de tendresse et soulagement devant ce spectacle auquel il ne parvenait pas à croire.
De plus en plus souvent l’épaisseur des broussailles l’empêchait de voir le cygne céleste, mais chacun des pas ou des battements d’ailes de celui-ci déposait une flaque lumineuse qui permettait au loup non seulement de se désaltérer mais de se voir et de se réconcilier peu à peu avec son apparence.
Tout le jour suivant et bien d’autres jours il a suivi la voie des flaques. Voulant avidement retrouver cette vision, il allait et montait sans savoir où jusqu’au moment où il dépassa non seulement l’étage des arbres mais aussi celui des arbustes et déboucha sur une lande brusquement interrompue par l’abîme d’une falaise abrupte.
Dans la blancheur du petit matin où le vent soufflait par rafales, plus trace de cygne; mais depuis les villages des hommes qui s’éveillaient dans leurs vallées, voici que revint le trouver l’oiseau de feu qui grandissait en s’approchant, remontant à travers les trouées entre les nuages, grandissait, grandissait encore jusqu’à ce que son oeil prenne la taille de la Lune.
Or c’était dans cet oeil de Lune, la même eau lumineuse que dans les flaques de la piste, la même que dans la fontaine de l’arbre; et dans son image au milieu des larmes qui semblaient des cygnes d’eau, il s’aperçut qu’il avait lui-même désormais un regard de cygne.
Il s’aperçut alors qu’il n’avait plus envie de déchiqueter des moutons, qu’il pourrait vivre de traces et de flaques, de plumes et pluies, qu’il n’avait plus envie de s’approcher des hommes, mais de les attirer en hurlant doucement dans le jour nocturne de l’oiseau rouge et bleu pour leur faire découvrir du haut de la falaise l’immense paysage autour de leur vallée, la multiplication des Soleils et des Lunes qui ruisselait de son propre coeur.
C’était au début des années 70. Je revenais de mon premier séjour au Far West, et je m’installais à Nice où la faculté des lettres m’avait invité comme professeur, poste qui devait durer trois ans, mais en me laissant entendre qu’il pourrait se stabiliser dès que j’aurais soutenu ma thèse sur dossier, ce qui ne s’est pas réalisé à cause d’un changement de vent politique à l’intérieur de l’université française.J’ai reçu une lettre de Gaston Puel que je ne connaissais pas encore même si son nom comme poète m’avait déjà frappé. Il me proposait de faire un livre avec une artiste d’origine russe dont je n’avais jamais entendu parler, Ania Staritsky. Or celle-ci était une amie intime d’amis niçois chez qui elle allait souvent, ce qui nous a permis de nous rencontrer et nous apprécier. Nous avons fait depuis de nombreux livres ensemble jusqu’à sa mort.
Elle voulait utiliser un papier du moulin de la Roque avec des trous préformés pour permettre à certains détails de traverser la page pour se mêler à d’autres; ce qui m’a donné l’idée de faire moi-même un texte en utilisant un système de feuilles trouées, ce qu’avait déjà fait dans leur domaine certains amis musiciens. C’était l’enfance des ordinateurs, grosses machines alors que l’on nourrissait avec des cartes perforées.
L’alliance de la combinatoire avec la séduction du beau papier artisanal nous a conduits tout naturellement au thème de Don Juan avec son catalogue. C’est ainsi qu’est née ma Chanson pour celui-ci dont les versions se développent encore. Ania Staritsky a voulu faire, outre le livre, une affiche gravée avec mes strophes. Gaston Puel nous a donné pendant toute l’affaire la plus entière liberté.
Il a fallu pour cela de la correspondance. J’avais pris l’habitude, depuis quelques années, d’écrire mes lettres sur des cartes postales découpées et recollées de toutes sortes de façons. Comme je repartais encore pour un an avec ma famille dans le Far West en 1973-4, Gaston m’a proposé de faire un petit livre pour sa belle petite collection “le bouquet” qu’il composait et tirait lui-même, un livre que j’illustrerais par une de mes cartes. C’était la première fois qu’on me prenait pour un artiste. J’étais ravi.
J’ai fait le nombre voulu de montages avec des vues représentant le campus de l’université du Nouveau-Mexique ou des avions de compagnies aériennes. On pouvait alors trouver facilement celles-ci dans les pochettes à l’intérieur des appareils, près des magazines et prospectus. Comme ce texte n’a jamais été repris, je pense que c’est le moment que je l’exhume en hommage.
Mon cher Gaston Puel
voici
je suis allé interroger pour vous
le loup et les nuages
pénétrants parcourir
les bâtiments des approches
loup moi-même et le bleu
caressant flairer
le feu des silences
loup et vent moi-même
haletant dévorer
les délices des regards
lointains et le bleu
renversant chanter
les approches du feu
les falaises et le vent
(aidez-moi aimez-moi
éclats et falaises
études et silences
portez-moi délivrez-moi
lointains et regards)
le bleu et l’immensité
murmurante éveiller
le feu des études
les éclats et les émois
naissants ouvrir
les déserts et les délices
(aidez-moi) et la contemplation
persévérante commencer
la conquête du temps
- un autre temps
toute l’épaisseur depuis
le chronomètre jusqu’à
l’éternité dont parlaient les pères
de l’église échouée
comme un rocher navire
au milieu de l’immensité sèche
(aidez-moi portez-moi
leçons des rochers) -
Marie-Jo revient du supermarché
Cécile de sa leçon de russe
Agnès de la piscine
Irène de son atelier de couture
Mathilde d’un anniversaire
(femmes de la piscine
délivrez-moi et ateliers
chantants renversez
les chronomètres de l’éternité)
en contemplation et chemins
dévorants haleter
à la conquête des femmes
anniversaires et feux
flairants caresser
le royaume des femmes
épaisseurs et délices
parcourantes pénétrer
le sommeil des femmes
avec tous mes voeux non tant
pour les fêtes prochaines
que
pour celles que nous saurons bien
inventer ou faire inventer
votre Michel Butor
CENT
PHRASES POUR LES ÉVENTAILS D’ARNOLD
SCHÔNBERG
I
1) Reposeront dans la question paisible de la paix.
2) Ils n’exigeront plus de savoir le chemin.
3) Amasseront et perdront peu.
a) Brûleront les mots et dans les mots, vénérant tous soupirs, parfums, fourrures, humeurs, pierres, éclairs, ombres, étoiles, vents, sources, chemins et mères.
4) Le ciel les sanglera d’amour invulnérable.
5) Désespérément espoir.
6) Art enchaîné ni par savoir ni par devoir.
b) Inventeurs de membres, élèves des oiseaux.
7) Difficultés comme aiguillon.
8) Leurs yeux ne leur serviront plus à ne point voir.
c) Serres pour orchidées volantes, les mousses s’y associeront, laisseront parfois pendre de longs filaments jusqu’aux montagnes, dénicheront le feu de la Terre dans les fissures de leur coeur.
9) Enfants la mère ne vous dérobera plus le sein.
d) Experts en construction de navires et longs voyages, partageront sagesses et vêtements.
10) Plus de maladie nécessaire.
11) Plus de passeport obligé.
12) N’appelleront plus le feu du ciel pour détruire leur vallée de larmes.
e) Allegro bruciando, sa tombe retourne l’horizon.
13) Pressentiments non préjugés.
14) L’Égypte quittée, la longue marche accomplie, leur terre promise découverte, construisant l’autre Jérusalem.
f) L’espace du suspens, pesée de pensée, matière de rêves.
15) Achèveront leur vie en interrogation.
g) Yeux à neuf, oreilles à vif, lettre de corps, esprit de chair.
16) Reviendront dans leur patrie quittée depuis toujours.
17) S’équilibreront comme les étoiles du ciel.
h) Libéreront leurs nostalgies, redécouvriront les consonances.
18) Le coeur de pierre d’Yaweh leur servira d’enclume.
i) Déchaîneront les fugues, jongleront avec les lois.
19) Cloîtrés dans l’ouvert.
j) Déduiront leur syntaxe du matériau, aimeront les balbutiements.
20) Ne tueront point leurs pères et ceux-ci ne les tueront point.II
21) Ne compteront plus douze mais treize.
22) N’imposeront plus l’image de l’abîme.
23) Le plus jeune exalté, le plus humble célébré.
k) Fouineront dans les dessous des vieux maîtres, tiendront le nerf de l’écho.
24) La Terre leur édifiera son loisir.
25) Ils se souviendront du Vieux du désert.
26) Ne fuiront plus l’omniprésence de l’oeil.
l) Salueront l’autre, immunité au compromis.
27) Transcriront des silences.
28) Leur parole prendra parole.
m) Hardis en lumière, glace des jours purs, feu pur des nuits.
29) Creuseront la tour de Babel.
n) Rêves gardés de leur enfance, plus du moins.
30) La douceur de leur vie passera la douceur de leur mort.
31) Mots-brandons pour usurpateurs.
32) Mithridatisés des discours.
o) Se laisseront prendre à leur bien trouvé, ne s’en voudront plus.
33) Forçant leur force.
34) Frères du malade et du criminel.
p) Choeurs du coeur, évalueront leur ignorance.
35) Les juges se laisseront juger.
q) Ne laisseront rien perdre du chant, regarderont de tous leurs pores.
36) Plus outre.
37) Personne esclave de personne.
r) Interprétation-transformation, transmettront à leurs ancêtres les traditions de leurs enfants.
38) Ne déclineront point l’hoirie d’antan.
s) École buissonnière, joueront à leurs travaux.
39) Renoncer même au sacrifice.
t) Savants, ouvriers, bergers parleront tous patois, ils se trouveront toujours un peu bêtes.
40) Leurs voies ne seront point les voies du Seigneur.III
41) Compenseront les genres en leurs dévotions.
42) Marqueront le monde sans laisser de traces.
u) Astiqueront leurs complexes, demanderont ce que c’était qu’une réaction petite-bourgeoise.
43) La bouche pleine de cristaux.
44) Riront de leurs oeuvres.
45) Leur agir et non-agir embellira la Nature.
v) Problèmes en main, sans chiper un fil.
46) Laisseront bruire les bruits.
47) Trouveront leur joie
w) Écouteront toutes cloches, ne craindront pas de déplacer les montagnes.
48) Finie la chasse au temps.
x) Ils apprendront à leurs camarades à jouer du piano, nouvelle neige.
49) Couleur des pierres dans le lit du torrent.
50) Chaleur du Soleil à la fin de l’après-midi.
51) Leur chant ranimera celui de la cigale.
y) Bol de lait frais, leur chant ranimera celui de la cigale.
52) Bol de lait frais.
53) Nouvelle neige.
z) Chaleur du Soleil dans la fin de l’après-midi, couleur des pierres dans le lit du torrent.
54) Ils apprendront à leurs camarades à jouer du piano.
aa) Finie la chasse au temps, trouveront leur joie.
55) Ne craindront pas de déplacer les montagnes.
56) Écouteront toutes cloches.
bb) Laisseront bruire les bruits, leur agir et non-agir embellira la Nature.
57) Sans chiper un fil.
cc) Riront de leurs oeuvres, la bouche pleine de cristaux.
58) Problèmes en main.
dd) Marqueront le monde sans laisser de traces, compenseront les genres en leurs dévotions.
59) Se demanderont ce que c’était qu’une réaction petite-bourgeoise.
60) Astiqueront leurs complexes.IV
61) Ils se trouveront toujours un peu bêtes.
62) Savants ouvriers bergers parleront tous patois.
ee) Leurs voies ne seront pas les voies du Seigneur, renoncer même au sacrifice.
63) Joueront à leurs travaux.
64) École buissonnière.
ff) Ne déclineront point l’hoirie d’antan, personne esclave de personne.
65) Transmettront à leurs ancêtres les traditions de leurs enfants.
gg) Plus outre, les juges se laisseront juger.
66) Interprétation-transformation.
67) Regarderont de tous leurs pores.
68) Ne laisseront rien perdre du chant.
hh) Frères du malade et du criminel, forçant leurs forces.
69) Évalueront leur ignorance.
70) Choeurs du coeur.
ii) Mithridatisés des discours, mots-brandons pour usurpateurs.
71) Ne s’en voudront plus.
jj) La douceur de leur vie passera la douceur de leur mort, creuseront la tour de Babel.
72) Se laisseront prendre à leur bien trouvé.
73) Plus du moins.
kk) Leur parole prendra parole, transcriront des silences.
74) Rêves gardés de leur enfance.
ll) Ne fuiront plus l’omniprésence de l’oeil, ils se souviendront du Vieux du désert.
75) Glace des jours purs feu pur des nuits.
mm) La Terre leur édifiera son loisir, le plus jeune exalté, le plus humble célébré.
76) Hardis en lumière.
77) Immunité au compromis.
78) Salueront l’autre.
79) Tiendront le nerf de l’écho.
nn) N’imposeront plus l’image de l’abîme, ne compteront plus douze mais treize.
80) Fouineront dans les dessous des vieux maîtres.V
81) Aimeront les balbutiements.
82) Déduiront leur syntaxe du matériau.
oo) Ne tueront point leurs pères et ceux-ci ne les tueront point, cloîtrés dans l’ouvert.
83) Jongleront avec les lois.
84) Déchaîneront les fugues.
pp) Le coeur de pierre d’Yaweh leur servira d’enclume, s’équilibreront comme les étoiles du ciel.
85) Redécouvriront les consonances.
qq) Reviendront dans leur patrie quittée depuis toujours, achèveront leur vie en interrogation.
86) Libéreront leurs nostalgies.
87) Lettre de corps esprit de chair.
rr) L’Égypte quittée, la longue marche accomplie, leur Terre promise découverte, construisant l’autre Jérusalem, pressentiments non préjugés.
88) Yeux à neuf oreilles à vif.
ss) N’appelleront plus le feu du ciel pour détruire leur vallée de larmes, plus de passeport obligé.
89) Pesée de pensée matière de rêves.
tt) Plus de maladie nécessaire, enfants la mère ne vous dérobera plus le sein.
90) L’espace du suspens.
91) Sa tombe retourne l’horizon.
92) Allegro bruciando.
93) Partageront sagesses et vêtements.
uu) Leurs yeux ne leur serviront plus pour ne point voir, difficultés comme aiguillon.
94) Experts en construction de navires et longs voyages.
95) Dénicheront le feu de la Terre dans les fissures de leur coeur.
96) Serres pour orchidées volantes les mousses s’y associeront laisseront parfois pendre de longs filaments jusqu’aux montagnes.
vv) Art enchaîné ni par savoir ni par devoir, désespérément espoir.
97) Élèves des oiseaux.
98) Inventeurs de membres.
ww) Le ciel les sanglera d’amour invulnérable, amasseront et perdront peu.
99) Vénérant tous soupirs parfums fourrures humeurs pierres éclairs ombres étoiles vents sources chemins et mères.
xx) Ils n’exigeront plus de savoir le chemin, reposeront dans la question paisible de la paix.
100) Brûleront les mots et dans les mots.
Le modèle se multiplie
sous les doigts du dessinateur
comme dans les autoportraits
c’est toujours un autre visage
la femme se présente aux yeux
sous de nouvelles perspectives
un paysage inépuisable
pour le Don Juan qui nous habiteAlors sur toutes les coutures
qui se défont dans le regard
une lingerie d’inscriptions
tatouages interchangeables
déploie ses improvisations
parmi pétales et silences
un interminable effeuillage
des parures de l’atmosphère
Nos antennes s’embrouillent
et nous n’arrivons plus
à trouver le chemin
qui ramène à la ruche
où sommes attendues
par nos soeurs ouvrièresNos yeux multipliés
ne voient plus que des ombres
comme si la journée
était déjà finie
l’hiver va nous surprendre
égarées dans les champsJe ne sais quel poison
s’insinue dans nos veines
nos ailes ralentissent
nos pattes maladroites
ne nous permettent plus
d’amasser le pollenNous aimons la fumée
que vous venez répandre
avec votre costume
ultra-cérémonieux
lorsque vous récoltez
le miel de nos rayonsNous vous faisions confiance
nous savions qu’en échange
vous nous apporteriez
tous les soins nécessaires
à nos architectures
et nos nourrissementsMais que s’est-il passé ?
Le pacte est-il rompu ?
Nous abandonnez-vous ?
N’êtes-vous plus capables
de nous entretenir
et de nous protéger ?
Nous n’en aurons jamais fini
de nous émerveiller devant
le corps de la femme depuis
douces cavernes prénatales
jusqu’aux hiéroglyphes des rides
résumant toute une expérience
vêtir dévêtir pénétrer
l’évidemment impénétrableChangeant les mythes et les poses
l’accompagnement le climat
la proximité l’abstraction
mettant au point des alphabets
pour nous inventer d’autres langues
afin de chanter et nous taire
nous glisser entre les surfaces
de cette chair philosophaleQuant au corps de l’homme il faudrait
devenir femme pour pouvoir
le faire briller s’épanouir
le radiographier le lancer
dans l’espace ou dans la peinture
la contemplation ruisselante
au-delà du sexe et des anges
dans la paix dont nous manquons tant
FLEURS ARTIFICIELLES AU BORD DE LA ROUTE
Indépendamment des saisons
ces pétales vont témoigner
qu’ici s’est arrêtée la vie
de quelqu’un qui nous fut très cher
dans un déchirement de tôles
crissements et gémissements
quelques instants de désarroi
dans la circulation massiveCette inaltérabilité
n’est certes qu’un leurre bientôt
le vent la pluie gel et poussière
et les rayons ultra-violets
vont flétrir et décolorer
ce qui nous faisait illusion
dans l’incessant vrombissement
qui tient ici lieu de silenceQuand nos souvenirs les plus vifs
feront naufrage avec nous-mêmes
tous ces signes à l’abandon
auront perdu leurs déchiffreurs
si l’on met des fleurs sur nos tombes
très vite elles disparaîtront
tandis que de la route même
les ronces couvriront les traces
1)
Le compas de la pyramide
mesure la distance exacte
entre les amoureux liseurs
et la voiture dont ils rêvent2)
En donnant du grain aux pigeons
entre les troncs des séquoias
le flâneur dédie à Vénus
le petit temple funéraire3)
Les écailles des pins reprennent
les attitudes du repos
entre les signes du zodiaque
sur la valise et le ballon4)
Les deux mains serrant la cambrure
de la charmeuse sur le banc
qui plane sur les graminées
sous les étoiles des voitures5)
Le lierre dans l’ombre commente
les tendres baisers protégés
par les consolidations d’angles
du vénérable bâtiment6)
Devant les églises jumelles
dissymétriques l’océan
de la place vide aux pavés
comme des lignes imprimées7)
Les anges précisent leurs sexes
autour de l’icône veilleuse
tandis qu’un visage fantôme
recouvre le violon dévot8)
Sur les berges du fleuve antique
sous les anges de la passion
le saxophoniste imagine
les rives du Mississippi9)
Le violoniste lui répond
en cherchant des accents de Vienne
devant graffiti sibyllins
qui voudraient franchir l’Atlantique10)
Cela se passera très vite
vous n’aurez pas besoin d’attendre
les attelages de Neptune
accompagneront votre image11)
D’où viennent ce voile et ces fleurs
se rafraîchissant à l’écume
que le pape d’un autre livre
a fait jaillir pour les amants ?12)
Les palmiers ouvrent leurs cordages
comme ses bras la jeune fille
interrogeant le lion qui garde
le dos du grand-homme inconnu13)
Le chien blanc surveille la rue
entre palmes et oliviers
dont les cicatrices regardent
comme les yeux du temps perdu14)
Aux thermes de Caracalla
le mélancolique tondeur
se pense cocher d’un quadrige
ou pilote de formule un15)
Le même ballon qu’à Venise
à New York ou à Saint-Denis
la mondialisation des jeux
précède celle des travaux16)
Ni l’un ni l’autre ne se doute
que l’autre est de l’autre côté
de la clôture cependant
que la parabole interroge17)
Sous la glycine défleurie
les jeunes filles pacifistes
se racontent leurs aventures
lors de la manifestation18)
Les déménageurs font descendre
l’escalier couvert de pétales
au canapé monumental
où d’autres se prélasseront19)
Les énormes pierres du temps
des empereurs laissent la place
entre les grilles du pouvoir
aux délicatesses baroques20)
Le ruissellement au travers
de l’anneau forgé par le temps
où l’on amarrait les chevaux
pour le débarquement des vivres21)
On fait la queue pour pénétrer
dans un autobus déjà plein
qui se faufilant dans l’histoire
nous conduira jusqu’au présent22)
Entre feuilles multicolores
yuccas cyprès et cheminées
on essaie la vespa d’un frère
déjà casqué pour dévaler23)
Les appliques de la paroi
transforment la ruelle encombrée
en nef d’un garage sacré
où l’on fait bénir les machines24)
Ils sont tellement habitués
à passer entre les moteurs
que le défilé des modèles
ne leur arrache aucun regard25)
Le rémouleur motorisé
sous l’enseigne de l’espadon
surveille le filet d’eau fraîche
qui vient désaltérer sa meule26)
Il s’agit de rendre la vitre
du café Farnèse aussi claire
que le regard de la serveuse
sur la courbe de la poignée27)
Coiffé de nouvelles sportives
il énumère ses retards
en attendant pour se raser
que l’appareil soit réparé28)
Dans le bric-à-brac de la ville
éternellement passagère
entre Flore lustre et poisson
il nage aux fleuves souterrains29)
Les perruches sur les vélos
ponctuent de leurs criailleries
la conversation des voisines
et les saluts des promeneurs30)
Il suffit de prendre en ses mains
tel trésor de marché aux puces
pour faire s’élargir une onde
de regards envies et questions31)
Sous les régimes de bananes
et la danse des ananas
pommes poires en étalage
comme galets sur une grève32)
Dans le mur des publications
informations romans cuisine
informatique histoire langues
une lucarne pour parler33)
Dans son atelier adouci
par des nudités consentantes
il ajuste son Colisée
d’anneaux débordant l’établi34)
A l’intérieur de son tunnel
de brique et béton l’ouvrier
se frotte les mains de plaisir
dans le miroir de son travail35)
Devant le Musée d’Art Moderne
modernité de plus d’un siècle
l’intrication d’automobiles
apporte un défi futuriste36)
Les irréductibles déploient
leurs écharpes de supporteurs
en descendant joyeusement
depuis la Trinité-des-Monts37)
Le personnel au grand complet
devant le musée des bouteilles
vient saluer comme au théâtre
après la représentation38)
Au fond l’obélisque d’Axoum
auquel nul ne prête attention
sans âge comme lampadaires
dans trafic et conversations39)
Depuis déjà plus de vingt siècles
on repeint et on rafistole
en installant nouvelles routes
des éclairages des égouts40)
Interdiction de stationner
il faut dégager le regard
pour l’énigme de ce logis
où tous les matériaux concourent41)
La cycliste fait irruption
dans ce décor que l’on croirait
fait pour un film hollywoodien
lui rendant sa réalité42)
Les touristes sont une plaie
mais quand ils tardent quel souci
alors on s’installe à leur place
en se tirant bonne aventure43)
La lanterne de la calèche
devient vitrine d’un fleuriste
un arum y tient lieu de flamme
auprès d’un rameau d’olivier44)
Les bucoliques de Virgile
se jouent maintenant dans les rues
entre bergers de mobylettes
sous les ombrages des volets45)
Les sorcières de propreté
avec leurs balais de genêts
regardent au fond de la fosse
l’orchestre des chats faméliques46)
C’est le logis des sans-logis
sous l’arche du pont éclairé
par la municipalité
le jeu y fait passer le temps47)
Les chemises des visiteurs
dans les loges du Colisée
semblent bouquets de roses blanches
pour les jeunes mariés tout neufs48)
Attention ! danger de glissade
disent les signaux sur les murs
dans le ruissellement des marbres
aux épuisés des galeries49)
A travers les trois ouvertures
de l’arc de Constantin la vie
quotidienne envoie ses embruns
pour rajeunir l’ecclésiastique
1) Les reportersUne arène de photographes
derrière celui qui les prend
l’autre côté est aussi plein
grésillant de flashs et déclicsAvec leurs boîtiers en tous genres
certains se contorsionnent pour
pêcher l’image inattendue
qui fera rire leur journal2) Les jeunes stars
Le trac en gravissant les marches
pour la première fois les robes
découvrant de belles épaules
les sourires un peu contraintsQuant aux hommes pour la plupart
ils sont engoncés dans leur frac
noeud papillon obligatoire
sauf pour les poses sur la plage3) Les vieilles stars
Rien ne les intimide plus
un grand métier dans le sourire
l’usage des mondanités
comme des altesses modestesOn salue la foule en délire
d’un petit geste de la main
et l’on applaudit les plus jeunes
pour capter leur vitalité4) Les représentants de l’ordre
Accumulation de képis
sur certains endroits stratégiques
dans le palais grand uniforme
fraîchement astiqué brosséIls veulent profiter des stars
mais doivent avoir l’oeil partout
se faisant discrètement voir
décoratifs et rassurants5) Le public
Soigneusement canalisé
il doit souvent se contenter
des emballages de la fête
palissades cordons gardiensMais il arrive qu’on lui lâche
quelque entreprenante starlette
qui ne demande qu’à montrer
son anatomie savoureuse6) Les organisateurs
Ils font sentir leur importance
dans la coulisse et les abords
mais parfois viennent par devant
pour accueillir ou présenterDans la somptueuse chambre noire
quand on distribue récompense
c’est eux qui pour la circonstance
font ruisseler les éclairages
Gîte après gîte on rencontre
toutes sortes de gens comme
aux auberges des romans
d’autrefois que de visages !
aventures de familles
qu’on désire préserver
mobilier accumulé
depuis des générationsSur les rayons des salons
ou des chambres quelques livres
oubliés par des clients
mais parfois trésors du père
ou d’un enfant disparu
des guides pour ses voyages
lors de soirées monotones
vers des mondes entrevus
Apprivoisant les ténèbres
jusqu’au velours bourdonnant
qui sépare les étoiles
nous captons l’apparition
des créatures venues
de la manière et matière
de nos angoisses nos rêves
en leur beauté convulsive
réfléchis par les miroirs
des télescopes mentaux
aux confins de l’universMon cher silence
viens près de moi
pour célébrer
nos découvertes
au labyrinthe
de tes cheveux
qui communique
avec les ombres
du nombre pi
sur nos poitrines
dans le matinMon cher soupir
allons chercher
l’autre côté
de nos empreintes
afin d’ouvrir
secrètement
une poterne
dans les remparts
de la lumière
et devenir
maîtres du temps
Ne sais qui je suis
ni ce que j’étais
je sais encor moins
ce que deviendrai
dans un an d’iciNe sais où j’en suis
pas plus d’où je viens
cherchant où je vais
me heurte partout
je trouverai bienEt chaque matin
mon miroir me montre
un autre visage
auquel je grimace
et puis je souris
Les pêcheurs qui rentrent tard
aperçoivent dans les vagues
les clochers et les tourelles
qui émergent lentement
des lames d’ardoise fine
puis fenêtres et balcons
tandis que sonne le glas
pour avertir du dangerSe hissant sur les terrasses
des jeunes filles marines
lancent comme des appels
cavatines cantilènes
avant de plonger soyeuses
dans la remontée des eaux
tandis que sombrent les toits
sous le couvercle d’écume
Les respirations Les parfums des fleurs
les couleurs des feuilles les inspirations
osciller couler les mouvements lents
les odeurs du soir palpiter dormir
inlassablement les cris dans les branches
les bruits des torrents une aile s’éveille
une aile frémit murmures du vent
1
Diamants émeraudes Les épines vives
les passages sombres cajoler siffler
les déclarations les venins subtils
les écorces sèches une aile s’enflamme
une aile s’envole corolles et crocs
les rameaux de gueules appeler partir
délicieusement les pistils gluants
Chaleureusement Les taches de ciel
étamines longues une aile s'enrage
une aile s’embrase ocelles moustaches
les grognements sombres bramer éclater
les accouplements fourrures et cornes
grondements d’entrailles les accouchements
voler soulever pelages de nuages
Une aile triomphe
les soupirs d’espoir
audacieusement
les baisers la nuit
glapir grésiller
silences grimaces
les dévorations
Cascades festins Les explorations
une aile s’enivre les accords profonds
fourrés dangereux une aile s’enchante
subrepticement racines crevasses
les ombres des loups solennellement
roucouler râler cavernes repaires
les ténèbres vertes piailler jacasser
Tremblements des lianes
les admirations
bondissements fauves
une aile se lasse
les terreurs nocturnes
musicalement
les couleurs du vent
Se terrer se taire Mouvements très lents
les odeurs du feu renifler ronfler
les stupéfactions les cris dans les herbes
les bruits des ravages les éloignements
une aile dérive les murmures tendres
les parfums du sol une aile descend
instantanément passages de cornes
Voluptueusement
clairières babines
les queues et les dents
les écorces grises
les interdictions
les rameaux rubis
une aile s’endort
Une aile est visée Ruser parcourir
amoureusement une aile est touchée
les venins sournois momentanément
les cous et les griffes les grognements noirs
corolles volutes les becs et les serres
les générations les grondements secs
les pistils brillants les pénétrations
2
Les taches de sang Les écorchements
chercher farfouiller les soupirs d’amour
une aile est blessée secouer charmer
progressivement une aile est en sang
les fourrures grises minutieusement
fumées étincelles les silences rouges
pelages de feu tonnerres orages
Cascades coquilles Tornades cassures
les respirations accords préparés
les fourrés menteurs les inspirations
tourner secourir racines ténues
une aile fiévreuse brasiers craquements
volcans projections une aile guérit
ténèbres vertiges éruptions coulées
Tremblements de lueurs
anges musiciens
bondissements d’orgues
les déclarations
terreurs feulements
incendies paniques
une aile atterrit
Flaques fondrières Les mouvements souples
les odeurs du vent échos et rumeurs
dryades et muses les cris étonnés
les bruits des halliers vibrations messages
les rapprochements une aile repart
une aile s’étire les accouplements
osciller couler les passages d’anges
Palpiter dormir
les clairières douces
inlassablement
une aile remonte
éventails couronnes
rameaux cavalcades
les accouchements
Les épines blanches Les dévorations
veiller retentir une aile escalade
une aile s’exerce appeler partir
monotonement grognements divers
corolles satyres délicieusement
diamants émeraudes grondements soudains
les pistils humides cajoler siffler
Une aile éblouit
les explorations
ocelles antennes
voler soulever
fourrures jaspées
chaleureusement
les pelages tendres
Rugir détaler Les cascades rousses
soupirs affamés bramer éclater
les admirations les fourrés charmeurs
baisers colonnades les stupéfactions
manger s’écrouler les ombres errantes
les silences blancs une aile moirée
une aile soyeuse ténèbres crissantes
3
Audacieusement Tremblements reculs
les accords lunaires subrepticement
glapir grésiller bondissements rouille
racines tordues une aile arc-en-ciel
une aile changeante les terreurs de l’aube
les cavernes rouges les interdictions
fleurir se faner les couleurs de mort
Germer et vieillir Les mouvements brusques
les odeurs de vase une aile ocellée
une aile brillante les cris des petits
les bruits du matin musicalement
piailler jacasser murmures salives
les parfums violents se terrer se taire
les générations passages de nuages
Les pénétrations
les clairières bleues
une aile tremblante
les écorces claires
instantanément
les rameaux de pourpre
renifler ronfler
Les épines rouges Les queues et les dents
une aile dansante les cous et les griffes
les venins mortels une aile égarée
déployer saisir les grognements blonds
corolles et nymphes ruser parcourir
voluptueusement grondements d’orgueil
les pistils luisants amoureusement
Les taches de suie
le cous et les griffes
ocelles miroirs
une aile exaltée
fourrures poitrails
chercher farfouiller
les pelages d’ocre
Momentanément Cascades geysers
soupirs assoiffés progressivement
les becs et les serres les fourrés sensibles
les baisers rapides fumées étincelles
une aile qui plonge ombres fugitives
les silences verts une aile qui freine
secouer presser les ténèbres pourpres
Tourner secourir
les accords futurs
minutieusement
les racines grêles
tonnerres orages
les cavernes rousses
une aile se pose
Une aile cuivrée Les accouchements
brasiers craquements une aile rieuse
bondissements d’eaux incendies paniques
volcans projections les bruits inquiétants
les terreurs paniques éruptions coulées
tornades cassures parfums électriques
les couleurs du sang anges musiciens
4
Mouvements divers Dryades et muses
les dévorations clairières peuplées
une aile curieuse les explorations
osciller couler une aile joueuse
murmures velours palpiter dormir
flaques fondrières les rameaux humides
passages de fauves échos et rumeurs
Épines sanglantes Inlassablement
vibrations messages étamines fières
venins délicieux éventails couronnes
les admirations grognements d’amour
une aile séduit les stupéfactions
veiller retentir une aile s’approche
pistils tentations appeler partir
Taches de rousseur
monotonement
ocelles saphirs
diamants émeraudes
une aile rougit
les éloignements
pelages de sable
Voler soulever Cascades sanglantes
soupirs d’amertume manger s’écrouler
délicieusement fourrés d’allégresse
baisers dans la mousse chaleureusement
cajoler siffler une aile s’étend
une aile soupire rugir détaler
les interdictions ténèbres et gouffres
Les générations
les accords brisés
s’ouvrir se fermer
une aile caresse
délicatement
cavernes velours
bramer éclater
Tremblements de fièvre Glapir grésiller
les pénétrations une aile songeuse
une aile frôleuse les écorchements
fleurir se faner les bruits des massacres
les terreurs soudaines germer et vieillir
audacieusement parfums de la nuit
couleurs de l’éveil subrepticement
Une aile survit
roucouler râler
cris dans la savane
les respirations
murmures de flûtes
aimer et mourir
passages de fleurs
Solennellement Épines pincées
clairières charmées musicalement
piailler jacasser les venins qui sauvent
écorces d’encens se terrer se taire
les inspirations corolles vibrantes
rameaux oriflammes une aile en enfance
une aile en naissance les pistils émus
5
Déployer saisir Les taches de miel
étamines vives ruser parcourir
instantanément ocelles mouvantes
grognements de cuivre une aile en nuances
une aile en croissance fourrures liquides
grondements de sistres les queues et les dents
les rapprochements pelages de nuit
Les accouplements Cascades furieuses
une aile en vacances les accouchements
chercher farfouiller une aile en puissance
baisers cavalcades secouer et presser
amoureusement les ombres propices
silences complices momentanément
les cous et les griffes ténèbres d’asile
Une aile en jouissance
les accords des plumes
les dévorations
racines tressées
tourner secourir
cavernes sonores
progressivement
Tremblements soudains Minutieusement
fumées étincelles une aile en errance
une aile en mouvance tonnerres orages
les explorations les bruits de la pluie
terreurs solitudes les admirations
brasiers craquements parfums des éclairs
couleurs du désastre incendies paniques
Mouvement des cornes
inlassablement
cris de retrouvailles
une aile en souffrance
murmures des feuilles
les stupéfactions
passages de lyres
Osciller couler Épines mâchoires
clairières liquides palpiter dormir
monotonement venins jaillissant
écorces de cuir délicieusement
une aile en patience corolles nombrils
rameaux surchargés une aile en partance
les éloignements les pistils offertsLes interdictions
étamines douces
veiller retentir
grognements partout
chaleureusement
grondement des antres
une aile en absence
Une aile en métal Diamants émeraudes
les générations une aile en miroirs
ocelles moirées les pénétrations
appeler partir baisers de serpents
fourrures givrées voler soulever
délicatement silences de plumes
pelages d’ébène audacieusement
6
Cascades mousseuses Subrepticement
cajoler siffler accords des ramages
une aile en rayons rugir détaler
Les écorchements une aile en écailles
ombres en détresse les respirations
manger s’écrouler cavernes refuges
ténèbres heureuses s’ouvrir se fermer
Tremblements de gongs Fleurir se faner
solennellement les odeurs des peaux
bondissements fuites musicalement
bramer éclater les bruits dans les antres
les terreurs vaincues une aile en étoile
une aile éventail les parfums des fleuves
les couleurs de l’aube les déclarations
Mouvements d’ensemble
germer et vieillir
cris dans les roseaux
instantanément
murmures partout
roucouler râler
une aile amoureuse
Les rapprochements Épines tremblantes
clairières noyées les accouplements
aimer et mourir venin goutte à goutte
écorces brûlées lécher mordiller
une aile vibrante corolles de lèvres
rameaux imbibés une aile en émoi
piailler jacasser pistils en attente
Se terrer se taire
étamines droites
les accouchements
une aile en détresse
déployer saisir
grondements d’ivresse
momentanément
Taches de lichens Progressivement
renifler ronfler une aile souillée
une aile rouillée les queues et les dents
les dévorations les baisers timides
fourrures fougères les explorations
ruser parcourir silences d’attente
pelages ramages chercher farfouiller
Une aile perdue
minutieusement
fourrés indigo
les cous et les griffes
ombres agitées
les admirations
ténèbres mouvantes
Secouer et presser Tremblements frissons
accords en suspens tourner secourir
inlassablement bondissements chutes
racines et baves monotonement
les becs et les serres les terreurs exquises
cavernes vivantes une aile en ébène
une aile en ivoire les couleurs des nuages
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Les éloignements Mouvements reptiles
les odeurs musquées les interdictions
brasiers craquements les cris de fureur
les bruits des galops une aile en corail
une aile de perles murmures d’abeilles
les parfums des sèves chaleureusement
tonnerres orages passages de plumes
Tornades cassures Épines ergots
une aile en silex anges musiciens
les générations une aile en argent
écorces de flammes les pénétrations
osciller couler corolles d’écume
rameaux déployés palpiter dormir
délicatement les pistils secrets
Une aile de harpe
étamines frêles
dryades et muses
grognements rageurs
les écorchements
grondements vengeurs
veiller retentir
Taches de résine Appeler partir
subrepticement une aile angoissée
une aile tremblante solennellement
vibrations messages baisers frottements
fourrures crinières éventails couronnes
les respirations silences de palmes
pelages de sel les inspirations
Cascades torrents
voler soulever
fourrés et ravins
une aile sirène
les ombres des rocs
diamants émeraudes
ténèbres de soie
Les déclarations Tremblements lunaires
accords instinctifs les rapprochements
manger s’écrouler bondissements voûtes
racines dentelles s’ouvrir se fermer
une aile d’automne terreurs vespérales
cavernes matrices une aile d’argile
cajoler siffler les couleurs des nids
Rugir détaler
odeurs des poissons
les accouplements
les bruits des combats
fleurir se faner
parfums capiteux
une aile de cendres
Une aile de neige Momentanément
bramer éclater une aile de froid
les cris dans les nids glapir grésiller
les accouchements écorces tisons
murmures poussières les dévorations
germer et vieillir rameaux embrasés
passages d’insectes aimer et mourir
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Épines de flammes Lécher mordiller
progressivement étamines foudres
une aile de vent minutieusement
roucouler râler une aile de sel
corolles festins piailler jacasser
les explorations grondements éclairs
les pistils tremblants les admirations
Les taches de boue Les stupéfactions
déployer saisir soupirs enlacés
ocelles mercure ruser parcourir
inlassablement les baisers volés
fourrures aigrettes une aile de roc
se terrer se taire silences cristaux
une aile de houle renifler ronfler
Cascades falaises
les éloignements
fourrés vibratiles
chercher farfouiller
ombres menaçantes
une aile marine
les ténèbres fraîches
Les queues et les dents Tremblements éclats
les accords vibrants les cous et les griffes
les interdictions bondissements secs
racines salubres les générations
une aile d’écume terreurs et fureurs
cavernes lactées tourner secourir
chaleureusement une aile en silence
Délicatement
odeurs des étangs
les becs et les serres
une aile d’alcool
les pénétrations
les parfums poivrés
brasiers craquements
Mouvements des reins Incendies paniques
audacieusement une aile de ciel
une aile d’hiver subrepticement
fumées étincelles écorces fissures
murmures des flots tonnerres orages
les écorchements rameaux étendards
passages des torches les respirations
Une aile d’espace
osciller couler
venins et vapeurs
solennellement
corolles et grappes
tornades cassures
pistils en émoi
LES TRÉSORS DE LA MARÉE BASSE
ONZE CENT ONZE
L’ABREUVOIR DE LA PRINCESSE
LEURRE
L’ISSUE
INAUGURATION
LE BOIS SACRÉ
RUMINATION
LA MUSE ÉLECTRIQUE
AU FOND DU JARDIN
ROTATION
TORNADE LÉGÈRE
CARRÉ DES MÉTÉORES
TREIZE À LA ONZAINE
LE LOUP CHERCHE SA VOIE
À TRAVERS L’ATLANTIQUE
CARTE COMMENTÉE
CENT PHRASES POUR LES ÉVENTAILS D’ARNOLD SCHÔNBERG
LA POSE ET LA ROSE
HEXAGONES EN DÉSARROI
CORPS À CORPS
FLEURS ARTIFICIELLES AU BORD DE LA ROUTE
CHRONIQUE ROMAINE
VINGT ANNÉES-FESTIVAL
LIVRES TROUVÉS
DE LA BELLE MANIÈRE
COMPLAINTE DES 15 ANS
LA VILLE ENGLOUTIE
AILES DANS LA JUNGLE